Question : De temps en temps, j'en ai assez d'essayer de faire des progrès spirituels. Comme il semble que je n'arrive à rien de toute façon, je perds toute mon énergie pour la pratique pendant un certain temps. Puis je vois à quel point je deviens malheureux et je dois recommencer à faire quelque chose pour me sortir de ce marasme. Mais lorsque je lis dans un texte de yoga qu'il faut "viser la perfection par une pratique assidue" et qu'ailleurs un gourou de premier plan dit que "la seule voie est naturelle et spontanée", sans aucun effort, je suis déconcertée et exaspérée. Mon esprit oscille continuellement entre faire et ne pas faire. Comment résoudre ce paradoxe ?
Réponse : Dans les moments de grande frustration dans nos efforts vers la Lumière, je pense que nous nous demandons tous : "Pourquoi est-ce que je fais ça ? À quoi cela sert-il ? Pourquoi devrais-je me donner la peine de faire un effort sur le chemin de la réalisation de soi ?" Nous constatons que tous les enseignements transmis nous enjoignent de pratiquer des austérités et des exercices spirituels (appelés sadhana dans la terminologie sanskrite du yoga) d'un type ou d'un autre, et pourtant des êtres éclairés nous disent également que la manière vraie et parfaite de comprendre la réalité se fait sans effort.
Comment concilier ces instructions apparemment disparates ?
Comme le dit l'un des plus grands sages de notre époque, Bhagavan Sri Ramana Maharshi :
"La conscience sans effort et sans choix est notre véritable nature. Si nous pouvons atteindre cet état et y demeurer, c'est très bien. Mais on ne peut l'atteindre sans effort. Si vous ne réalisez pas votre nature essentielle, votre vue reste obstruée. Quelle est cette obstruction ? Trouvez-la et éliminez-la. Les efforts ne servent qu'à éliminer les obstacles qui cachent la vraie vision. La vraie nature reste la même. [Une fois réalisée, elle est permanente... Un pratiquant acquiert la paix et est heureux. Cette paix est le résultat de ses efforts. Mais l'état réel est sans effort. L'état sans effort (état superconscient) est le véritable état et l'état parfait. Il est permanent.
Lorsque les efforts sont spasmodiques... leurs résultats le sont aussi. 2
Il ne fait aucun doute que l'absence d'effort est une chose à laquelle nous aspirons tous dans notre sadhana, peut-être parce que nous savons intuitivement qu'en réalité, nous n'avons rien à faire : il nous suffit d'être consciemment. Mais nous avons oublié comment. Nous essayons donc diverses méthodes pour nous le rappeler. Le simple fait de rester à la maison et de s'en tenir consciencieusement à sa pratique de la méditation ou du yoga à des heures précises, jour après jour, demande un effort intensif, alors que vos amis sont tous en train de s'amuser ou vous invitent à les rejoindre - surtout si vous avez l'impression que vous n'arrivez à rien avec tout cela.
Au début de ma pratique, après un an ou deux d'austérité auto-imposée, je me souviens de ma joie lorsque je suis entré en contact avec l'école de pensée dont la devise était : "Ne poussez pas la rivière, elle est là" :
Ne poussez pas la rivière, elle coule toute seule !
Quelle excitation m'a envahi à l'écoute de ces mots ! C'était presque une révélation en soi. C'est tellement évident ! Ne suis-je pas en train de forcer les choses avec toutes ces austérités et ces pratiques ? Pourquoi ne pas me laisser porter par le courant, comme tout ce qui se passe dans la nature ? La rivière n'a pas besoin de se forcer, elle coule simplement avec son propre élan, cherchant son niveau. Si l'harmonie intérieure et la félicité sont ma véritable nature, alors pourquoi est-ce que je fais tous ces efforts pour devenir ce que je suis déjà ?
Peut-être que j'ignore le flux de la nature, me suis-je dit, si quelqu'un veut que j'aille voir un film avec lui et que je refuse d'y aller ? N'est-ce pas en fait le processus naturel du Guruverse qui est à l'œuvre en m'apportant l'invitation ? C'est donc avec de telles justifications que j'ai décidé, avec un grand soulagement, de céder et d'abandonner ma sadhana.
Crédits : Image fournie ; Auteur : Muz Murray ;
Cependant, j'ai découvert que le fait de "simplement s'écouler" était plus vite idéalisé que réalisé. Si seulement on pouvait se laisser aller et se détendre suffisamment pour simplement s'écouler avec le monde, alors ce serait en effet le moyen parfait de réaliser la "nature essentielle" de soi-même. Mais pour la plupart d'entre nous, malheureusement, cela ne semble pas fonctionner de cette manière. Avez-vous déjà essayé de vous laisser porter par le courant ?
Dans le premier élan de liberté, c'est peut-être merveilleux, mais combien de temps pouvez-vous tenir ? Très vite, on sort du rêve conceptuel de la "fluidité" et on est aspiré par un flot incessant de pensées contradictoires. Des choses telles que l'appréhension, l'inquiétude, la peur, l'amour, la convoitise, la crispation, et ainsi de suite, commencent bientôt à se bousculer comme des flots à la surface de l'esprit. Nous nous retrouvons entraînés dans les tourbillons du courant social et pris dans toutes sortes de distractions inutiles qui nuisent à notre tranquillité d'esprit, sans même réaliser où le changement a commencé. Très vite, l'esprit retrouve son état habituel de désorganisation et de chaos.
C'est à ce moment-là que je me suis rendu compte que je pourrais continuer ce genre de "libre circulation" jusqu'au jour du Jugement dernier et que je n'en serais pas plus heureux pour autant. Je pensais que c'était l'état d'esprit du chou moyen. Mais après avoir été désillusionné à la fois par ma sadhana et par le free-flowing, j'étais totalement désorienté et j'ai succombé à cette terrible affliction des aspirants spirituels, la "nuit noire de l'âme". C'est un état dans lequel la vie perd tout son sens et toute sa saveur. Lorsque la maladie de l'âme me frappait, je me tournais toujours vers la nature pour trouver du réconfort.
La deuxième partie suivra : Comment j'ai trouvé ma voie
D'après : Sharing the Quest : Révélations d'un mystique franc-tireur
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